jeudi 8 décembre 2011

Une mauvaise eau peut-elle ruiner votre thé ?

Tout d'abord, qu'est-ce qu'une mauvaise eau ? En supposant que nous parlons d'eau destinée à la consommation humaine, existe-t-il une mauvaise eau ?

Quelles sont les caractéristiques de l'eau pour le thé ?

  • minéralité (résidu sec)
  • dureté (TH)
  • acidité (pH)
  • alcalinité (TA / TAC))
  • température (T)
  • gaz dissous (CO2 et gaz de l'air)
  • équilibre calco-carbonique (eau agressive, à l'équilibre, eau entartrante)
  • salinité (sodium, ...)
  • nature des ions présents dans l'eau
  • force ionique de l'eau
  • composés organiques
  • présence éléments métalliques (fer, manganèse..)
  • présence de résidus de traitement de l'eau (ex. composés chlorés, THM)
  • propriétés organoleptiques de l'eau utilisée
Si le goût de l'eau vous déplaît, le thé sera-t-il suffisant pour obtenir une bonne liqueur ? 
Commencez donc par une eau agréable au goût.

Quel est le rôle de l'ébullition ? Faut-il faire bouillir l'eau et pourquoi ?

L'eau est un solvant très puissant qui dissout beaucoup de composés. Pour préparer un bon thé, vous voulez que les composés que vous aimez dans les feuilles de thé se retrouvent dans la liqueur, quels sont les phénomènes qui régissent ce transfert ?
Le thé contient de nombreux composés certains sont thermolabiles, c'est-à-dire qu'ils se détruisent sous l'effet de la température. Il contient également des composés organiques volatils qui s'évaporent donc facilement.

On peut donc déjà affirmer qu'une mauvaise eau serait une eau trop chaude qui détruirait certains composés du thé (par exemple, le thé vert réclame une température bien en dessous de la température d'ébullition).
Ensuite, il y a l'inverse, une température trop basse ne permettra pas au thé de donner tout son potentiel.

Je ne suis pas d'accord avec l'article de Wikipedia Température de l'eau sur plusieurs points
"Plus le thé est de qualité, plus il sera fragile et demandera une eau moins chaude." Cela dépend de la nature du thé (blanc, vert, bleu-vert, noir...) et non de sa qualité.
"Il est déconseillé de faire bouillir l'eau, car elle perdrait de l'oxygène et donnerait un goût fade au thé." Il est conseillé de faire bouillir l'eau (certain disent "ouvrir l'eau" ce qui correspond à un dégazage partiel, de plus tous les pays n'ont pas l'eau potable au robinet), mais pas trop longtemps. Le fait de faire bouillir l'eau modifie son état vis-à-vis de l'équilibre calco-carbonique et des gaz dissous (une partie des carbonates et bicarbonates précipitent).
Ensuite, il y a la façon de verser l'eau bouillante dans la théière et la température de celle-ci quand l'eau y arrive, connaître la température de l'eau dans la bouilloire ne donne qu'une information relative sur la température de l'eau en contact avec le thé, c'est pourquoi je ne crois pas trop aux bouilloires qui indiquent la température, ça me semble être inutile. Faire bouillir trop longtemps conduit à dégazer l'eau et lui faire perdre une partie de ses propriétés organoleptiques. Verser l'eau bouillante en cascade sur la paroi de la théière ou du zhong (gaiwan) permet de faire diminuer sa température tout en "l'oxygénant" (on remplace du CO2 dissous par O2 de l'air et le pH augmente).

Après ces quelques réflexions, on peut conclure, qu'il n'y a pas de mauvaise eau, mais que certaines eaux sont préférables à d'autres selon les goûts de chacun et la nature des thés préparés. Le nombre de paramètres étant très grand, il faut éviter de donner des règles comme "une eau trop calcaire...."  : parle-t-on de la teneur en ions calcium ou parle-t-on aussi des carbonates et bicarbonates ? Ou bien "telle eau est meilleure car elle contient x mg/L de résidu sec à 180°C" en oubliant le pH et l'alcalinité. Encore une fois, il est nécessaire d'expérimenter avec le thé.

Egalement, on pourra envisager les interactions de l'eau et du matériel pour préparer le thé : argile, porcelaine, verre... et faire une dégustation d'eau chaude.

Rappel historique : Lu Yu (733-804) fut l’un des premiers maîtres de thé chinois à avoir étudié la question en détail. Pour lui, la meilleure eau provient des sources qui coulent doucement en montagne [cette eau est semblable à l'eau du robinet qu'ont certains dans les montagnes, la chloration en moins], puis viennent les eaux de rivière de plaine [l'eau qui ne coulent ni trop vite, ni trop lentement, au milieu de la rivière l'eau est claire vers la surface et elle n'est pas croupie, ex. rivières à truites dont on voit le fond...]. Les eaux de puits sont les moins bonnes [elles ne sont pas aérées et peuvent être chargées en matières organiques ou en sels ou pire être contaminées si des latrines se trouvent à proximité].

Dans un prochain billet nous explorerons d'autres paramètres. J'espère vos commentaires.


 


3 commentaires:

  1. Bonsoir et joyeuse nouvelle année.

    Je découvre votre blog via un échange de commentaires sur le blog "la voie du thé". Cet article m'intéresse puisqu'il répond à certaines questions que je me posai sur l'eau.
    Une chose m'intrigue : vous écrivez : "Verser l'eau bouillante en cascade sur la paroi de la théière ou du zhong (gaiwan) permet de faire diminuer sa température tout en "l'oxygénant" (on remplace du CO2 dissous par O2 de l'air et le pH augmente). Or, verser l'eau ne prend pas 3 secondes, l'eau a-t-elle réellement le temps de se modifier (de se charger en dioxygène) ?

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  2. Il faut considérer la surface en contact avec l'air, non seulement lors de l'écoulement de l'eau (en cascade) dans l'air mais aussi en ruisselant sur les parois et également par la présence de bulles d'air emprisonnées lors de l'écoulement qui vont ensuite remonter. Pour quantifier, il faudrait faire des mesures et aussi tenir compte de la présence des bicarbonates... Joyeuse nouvelle année à vous aussi !

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  3. Bonsoir, si vous êtes intéressés par la Chine et que vous voulez apprendre le Chinois, je vous conseille : http://chineseinstitute.fr :)

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